Je vous vois déjà penser à Amazon et relier cette note avec la décision d’interdire, en France, la cumulation de la livraison gratuite et des 5% de remise sur les livres. Pourtant, il n’en n’est rien.
Amazon est effectivement un cas unique parmi l’ensemble des e-commerçants tant par la stratégie mise en place que par les fonds qui ont permis au modèle de tenir le cap pendant des années en étant malgré tout parfois déficitaire.
Alors pourquoi une telle assomption?
En réalité, l’idée n’est pas neuve puisque déjà en 2011, le PDG d’Ebay annonçait la « mort de l’ecommerce », repris dans un très bon livre blanc diffusé par la Fevad d’ailleurs.
Il est important de comprendre plusieurs choses quand on parle d’ecommerce:
1. C’est un canal uniquement
L’ecommerce ne représente qu’une infime partie du retail (5% en France, 8% au mieux aux U.S.) et ne pourra jamais dépasser les 20% car les consommateurs (hormis pour certains secteurs comme le voyage) aiment pouvoir se rendre dans les magasins même lorsqu’ils achètent en ligne.
Ainsi pour Darty, ce n’est pas moins de 40% des clients qui achètent en ligne puis vont chercher en boutique.
Le maillage physique est ainsi indispensable dans l’usage mais plus que cela, afin de négocier avec les marques, il faut pouvoir peser lourd dans l’industrie et un pure player devra représenter une grande partie de l’ecommerce afin de pouvoir compter (50% de 5%, ça reste 2,5% du total).
L’omnicanal est sur toute les langues mais surtout parce qu’il représente une réalité pour les consommateurs dans la majorité des secteurs.
Cela explique sans doute pourquoi Pixmania avait ouvert des boutiques avant d’être finalement revendu pour 1 Euro symbolique. Dans le cas de Cdiscount, c’est un peu différent mais ce dernier s’appuie sur le maillage du groupe Casino qui possède l’enseigne.
2. Le business model est plus que discutable
Nous adorons tous l’idée de pouvoir être livré le lendemain ou sous 2 jours mais cette course à la livraison rapide à un coût (idéalement sans la payer).
Afin de faire du commerce, il faut pouvoir gérer des stocks, optimiser sa logistique et c’est nécessairement couteux.
Là dessus s’ajoute la course à l’audience et dans ce cadre le SEA &le SEO peuvent vite s’avérer très couteux mais surtout ils connaissent également certaines limites à un moment.
Dans un marché ou les marges sont très faibles, il faut pouvoir vendre beaucoup afin de trouver un équilibre.
D’ailleurs, l’analyse de Virginie Carteron dans sa thèse qui compare les marges des principales forces en présence en France est équivoque:
Et encore….il suffit de regarder l’évolution des profits d’Amazon pour se rendre compte qu’ils perdent de plus en plus d’argent.
Problématique d’autant plus compliquée quand on lit que désormais les magasins arrivent à être moins cher qu’Amazon .
Ventes Privées a trouvé un modèle puisqu’ils ne gèrent aucun stock: ils commandent effectivement aux marques une fois que la vente est terminée et livrent sous 14 jours (nous sommes loin des 1 ou 2 jours). « Under Promise & Over deliver » est leur moto.
Et encore, le lancement de Rosedeal et le rachat récent d’une start-up proposant des coupons sur mobile montrent bien que Ventes Privées a besoin de s’étendre dans le monde physique.
Les conséquences:
1. Le marché de l’ecommerce va nécessairement se concentrer sur quelques players (des rapprochements sont à prévoir) afin d’atteindre la taille critique nécessaire pour survivre. C’est tout le travail qu’Amazon fait depuis des années.
2. Des petits players spécialisés pourront totalement être rentables
3. Au final, à part dans certains secteurs et pour quelques petites niches, ceux qui tireront leur épingle du jeu, seront nécessairement les marques jouant sur une distribution multicanal et idem pour les réseaux de distribution existants.
4. Le digital modifie totalement la relation au commerce évidemment
4. L’impression 3D fera nécessairement bouger un peu les lignes mais cela prendra du temps avant que cela soit totalement intégré sur le marché.
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