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Vlan #68 Les gilets jaunes et l’usage sombre des réseaux sociaux


Fabrice Epelboin est enseignant à Science Po Paris autour des problématiques de surveillance de masse, de cybersécurité et de l’usage sombre des réseaux sociaux. Je n’aime pas traiter des sujets d’actualité sur mon podcast mais nous devions enregistrer avec Fabrice et il est impossible d’ignorer les « gilets jaunes » quand on discute avec lui. Notre seule volonté est sans doute de donner un éclairage différent et de montrer une fois de plus l’usage des réseaux sociaux dans le phénomène mais aussi de comprendre pourquoi nous en sommes là aujourd’hui. J’ai conscience qu’il y a de nombreux articles et vidéos sur le sujet mais je crois que l’angle par lequel nous l’abordons est plutôt inédit ou pas assez traité, je vous en laisse juge.


La discussion pourrait durer 3h sans aucun souci mais nous avons essayé de nous restreindre au format de Vlan soit en 30 minutes environ.

Les gilets jaunes n’auraient pas pu exister sans Facebook et Google Maps

Comme discuté au préalable avec Guy Philippe, il a été prouvé que l’on peut utiliser les réseaux sociaux et en particulier Facebook afin de manipuler à grande échelle les opinions. Plusieurs révolutions ont eu lieu en raison de Facebook et certains régimes se sont d’ailleurs fait renversés. Que ca soit la révolution arabe, l’élection de Trump ou d’autres régimes, on a bien vu l’impact que pouvait avoir les réseaux sociaux. Dans le cas des gilets jaunes ce qui est intéressant ce n’est pas la manipulation de masse mais plutôt l’usage de Facebook et Google Maps. Les gilets jaunes ne sont pas un mouvement mais l’expression d’une colère généralisée totalement organique. Cette colère a pris sa source dans de nombreux foyers et c’est structuré sur des groupes Facebook. Le constat principal reste que dans la mesure ou la moitié des français ne s’informent que par Facebook, la plateforme devient beaucoup plus centrale que les créateurs de contenus. Avec le bémol suivant, c’est que Facebook est un distributeur de contenus très sophistiqué que l’on peu acheter et donc influencer. Comme le souligne Fabrice, il serait possible de cibler (geo targeting) les foyers des gilets jaunes avec des campagnes facebook pour embraser les foules. Il suffirait de leur montrer énormément d’articles réels (pas des fake news) avec lesquels ils ne sont pas en accord. Nous savons où ils sont et nous pouvons les cibler, nous savons quoi leur montrer, c’est relativement simple et peu couteux. Cela peut faire peur mais c’est la réalité aujourd’hui.

Les gilets jaunes sont ils des « fachos »?

C’est en tous cas ce que l’on lit partout. D’ailleurs, il y a effectivement des accidents racistes parmi les rassemblement des gilets jaunes. De plus, il est intéressant de se rendre compte qu’en regardant les photos des gilets jaunes il n’y a ni noirs ni arabes donc tout cela pourrait conforter l’idée. Toutefois, ce que relève Fabrice, ce sont plusieurs choses. D’abord, dans la mesure ou les gilets jaunes représentent la majorité des français, il est impossible de les regrouper sous le terme « Fachos ». Les gilets jaunes ne sont pas « un mouvement » mais 2 000 mouvements qui viennent de la base et ne sont pas organisés par qui que ce soit même s’il y a des appropriations politiques. Enfin, les regrouper sous le terme de « facho » ne permet pas de résoudre les soucis donc c’est inutile. Les gilets jaunes ne sont pas nécessairement là pour négocier mais pour s’opposer et exprimer de la colère. Il faut écouter cette colère qu’on peut avoir du mal à comprendre quand on est citadin mais, selon Fabrice, les gilets jaunes sont l’expression de tout ce qu’on a voulu taire voire censurer pendant des décennies. Par exemple la perte de crédibilité de tous les corps intermédiaires, le communautarisme, la montée du religieux, le racisme et de nombreux autres sujets… Et selon Fabrice, on voit partout ces communautés se radicaliser même les vegans qui commencent à attaquer des boucheries.

Selon Fabrice, nous ne sommes qu’au début d’une contestation majeure en France qui vient de la base. Pour le décrire au mieux, Fabrice envisage un Mai 81 inversé mais nous aurions tort de prendre tous ces mouvements de haut. Il faut débattre des sujets qui fâchent et faire face réellement à ce qu’est la France dans son intégralité et ne pas faire comme si tout cela n’existait pas. Depuis les années 80, nous avons tout géré par la censure mais ne pas parler du racisme ne le fait pas disparaitre.

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